Des Armes - Paroles
Des Armes
Musique : Noir Désir
Des armes, des chouettes, des brillantes,
Des qu'il faut nettoyer souvent pour le plaisir
Et qu'il faut caresser comme pour le plaisir
L'autre, celui qui fait rêver les communiantes
Des armes bleues comme la terre,
Des qu'il faut se garder au chaud au fond de l'âme,
Dans les yeux, dans le coeur, dans les bras d'une femme,
Qu'on garde au fond de soi comme on garde un mystère
Des armes au secret des jours,
Sous l'herbe, dans le ciel, et puis dans l'écriture,
Des qui vous font rêver très tard dans les lectures,
Et qui mettent la poésie dans les discours.
Des armes, des armes, des armes,
Et des poètes de service à la gâchette
Pour mettre le feu aux dernières cigarettes
Au bout d'un vers français brillant comme une larme.
Explications
Il y a des textes dramatiques : Ce poême de Ferré est tiré d'une œuvre intitulée "Lamentations devant la porte de Sorbonne" écrit en 1968. Il a été publié en 1969 dans le N°5 de la revue "La rue". Il a été mis en musique par Bertrand Cantat du groupe Noir Désir dans l'album "Des visages, Des figures" sorti le 11 septembre 2001, jour des attentats meurtriers aux Etats-Unis. La chanson est également présente sur l'album "Avec Léo" sorti en 2003. Il s'agit d'un album de reprises de Léo Ferré par différents artistes. Le 27 juillet 2003, Bertrand Cantat, à la suite d'une dispute, frappe à plusieurs reprises sa compagne, Marie Trintignant. Elle décède de ses blessures 5 jours plus tard.
Le texte est construit sur une métaphore : Léo Ferré compare les mots (sans jamais les citer expressément) aux armes. Cette comparaison ne prend son sens qu'au dernier vers (dit "vers de chute"): "Au bout d'un vers francais". Il s'agit bien d'une énigme invitant le lecteur à revenir sur le texte pour le comprendre : On serait en effet étonné de voir Ferré faire l'apologie de la violence : des armes.
Le 1er paragraphe évoque une certaine perversion : Il s'agit du plaisir que peuvent procurer les armes. Le 3ème vers indique la méprise possible sur le sens des 2 premiers : Il évoque l'"autre" plaisir : celui des communiantes. Les communiantes sont les jeunes filles catholiques préparant leur communion. Il évoque donc bien la prière : ces mots pensés qui ne sont pas nécessairement exprimés. "Des qu'il faut se garder au chaud au fond de l'âme".
Ferré, anarchiste et donc athé dés 1947, n'a jamais renié totalement la religion comme dans la chanson "ni dieu, ni maitre" : "Cette parole d'évangile (...) je la revendique, et je vous souhaite ni dieu, ni maître".
Le début du second paragraphe "Des armes bleues comme la terre" est riche sémantiquement. Le bleu est historiquement la couleur divine (ayant donné... Morbleu et Parbleu), mais aussi la couleur de l'amour, des artistes. Comme par exemple dans la Quête de Jacques Brel : "les villes s'éclabousseraient de bleu. "
Pour définir cette couleur, il utilise la planète Terre : Nous sommes en 1969. L'homme marche sur la lune et voit la planète bleue vue d'en haut : il s'agit peut-être d'une vision spatiale au moins inconsciente.
Dans les vers suivants, le champ sémantique n'est plus celui des armes, mais bien celui des mots et de l'amour : "Dans les yeux, dans le coeur, dans les bras d'une femme".
Le 3ème paragraphe, nous rappelle les 2 premiers : le secret des jours, l'herbe (des jeunes filles en fleur), le ciel... et puis, l'écriture qui est le 1er mot permettant de discerner le sens du texte.
Viennent ensuite les lectures, la poésie et les discours : le champ sémantique est devenu clairement celui du language.
Le dernier paragraphe, commence par une répétition du titre 3 fois, comme pour marteler un texte qui devient violent, et effectuer une rupture avec le précédent paragraphe.
Dans le vers suivant, on retrouve l'évocation de la métaphore : le poête à la gachette. Comment le poête peut-il utiliser ses armes ?
"Pour mettre le feu aux dernières cigarettes", voilà pourquoi le poète doit se battre : contre la peine de mort (la dernière cigarette), mais aussi contre tous ces morts commandés par l'état, contre la guerre par exemple.
Voilà donc le paradoxe, se battre avec des armes contre une certaine violence.
Le dernier vers aboutit à cette conclusion : la tristesse. On peut noter le double sens du mot "brillant" qui peut être utilisé à la fois pour désigner le reflet sur une arme, mais aussi comme remarquable dans le cas d'un vers francais.
Ce texte nous évoque ce vers de Gabriel Celaya (poète espagnol) que chante Paco Ibañez et que Léo a pu lire : "La poésie est une arme chargée de futur".
"Des armes et des mots, c'est pareil. Ça tue pareil" Léo Ferré - Le Chien
Des Armes dans "The Voice"
Sol interprète cette chanson lors de l'émission "The Voice" le samedi 9 avril 2016 d'une merveilleuse manière à 5mn20 de la séquence.
Des Armes interprété par Noir Désir en concert
Bertrand Cantat
Bertrand Cantat est le chanteur et guitariste du groupe de rock français Noir Désir. Noir Désir a contribué, à partir de la fin des années quatre-vingt, à revigorer la scène rock française, alors dominée par les formations anglo-saxonnes - en apportant spontanéité, énergie et un discours parfois engagé.

Bertrand Cantat jouant de la guitare
aux Francofolies de La Rochelle,
en juillet 1993
Noir Désir
Noir Désir est un groupe de rock français formé en 1980, l'une des formations majeures de la scène nationale dont la ligne musicale s'est accompagnée au fil des albums d'un discours politico-social militant qui a contribué à définir son identité.
La personnalité artistique affirmée de Noir désir
À l'aube des années quatre-vingt, Bertrand Cantat (textes, chant, guitare et harmonica) rencontre Serge Teyssot-Gay (guitares) et Denis Barthe (batterie) dans un lycée bordelais, puis Frédéric Vidalenc (basse) ; ensemble, ils décident de former Noir Désir. évoluant en marge du courant rock alternatif en vogue à cette époque, Noir Désir s'en distingue notamment par sa sonorité anglo-saxonne - l'influence de la new wave britannique est dans un premier temps omniprésente - et par la qualité de ses textes à la fois poétiques et tourmentés. Mais, pour le public, la réussite du groupe repose avant tout sur son chanteur, Bertrand Cantat : son timbre de voix unique et son jeu de scène fougueux lui confèrent un charisme et un charme mystérieux que les médias comparent volontiers à ceux du chanteur des Doors, Jim Morrison, influence par ailleurs clairement revendiquée par le groupe.
En 1986, Noir Désir accepte de signer chez Barclay tout en restant critique par rapport au star system et fidèle à ses convictions artistiques et politiques. Le groupe sort en 1987 son premier album, contenant six titres et intitulé Où veux-tu qu'je r'garde ?, qui contient déjà en germe toute la rage d'une musique fondée sur de violentes ruptures de rythme.

Des visages, des figures
de Noir Désir
Les premiers succès de Noir Désir : indépendance et fidélité
C'est en 1989 que Noir Désir connaît son premier succès commercial avec l'album Veuillez rendre l'âme (à qui elle appartient), que la critique rock et le public saluent unanimement (330 000 exemplaires vendus). Le single « Aux sombres héros de l'amer » entre dans le Top 50 (hit-parade des meilleures ventes de disques en France) et offre au groupe une notoriété qui les inquiète, car ce morceau n'est, selon eux, pas caractéristique de l'album. C'est donc à nouveau sur scène qu'ils vont réaffirmer leur ligne musicale et fidéliser un public de plus en plus large. Leur troisième album, Du ciment sous les plaines (1990), s'inscrit dans une lignée rock « pure et dure », notamment représentée par le titre « En route pour la joie ». Le groupe confirme ainsi la nature de son style musical, qui s'accorde pleinement avec ses remarquables et énergiques prestations scéniques. En 1992, Tostaky (contraction de l'expression espagnole Todo esta aqui, soit, littéralement, « tout est ici ») et son 45 tours éponyme font l'effet d'un véritable raz-de-marée (400 000 exemplaires vendus). La longue tournée qui accompagne la sortie de l'album (environ 120 concerts) est triomphale et donne lieu à un double album live intitulé Dies irae (1994).
L'évolution du groupe Noir Désir devenu culte
Noir Désir revient sur le devant de la scène en 1996 avec un nouveau bassiste, Jean-Paul Roy, et un talentueux saxophoniste, Szelevenyi Akosh. L'album 666.667 Club, vendu à plus de 700 000 exemplaires, est celui de la maturité. C'est l'année de la consécration pour Noir Désir : adulé par le public et encensé par les professionnels du disque (meilleur groupe de l'année 1997 et meilleure chanson avec « l'Homme pressé » aux Victoires de la musique), le groupe prouve qu'il est possible d'accéder à la popularité sans renier ses convictions artistiques et politiques.
Attirés par de nouvelles expériences musicales - 13 titres du répertoire de Noir Désir sont notamment remixés par différents artistes appartenant pour la plupart à la scène techno dans le cadre du disque One Trip One Noise (1998) -, les membres du groupe multiplient les collaborations (Alain Bashung, Yann Tiersen, etc.), s'investissent dans des projets personnels (tel Serge Teyssot-Gay, dont l'album solo On croit qu'on en est sorti paraît en 2000) et se plongent dans le répertoire « classique » de la chanson française en reprenant notamment une chanson de Jacques Brel et de Georges Brassens dans le cadre d'albums collectifs - respectivement Aux suivants (1998) et Les oiseaux de passage (2001). Des visages, des figures, synthèse de ces influences éparses (musiques électroniques, free jazz, etc.), paraît à l'automne 2001 : projet ambitieux, parfois teinté de minimalisme formel - les arrangements et la tonalité d'ensemble y témoignent, à quelques exceptions près, d'une sobriété inédite -, l'album permet au groupe de tenter un profond renouvellement de ses acquis.

Pochette de l'album "Avec Léo" (2003)
Léo Ferré
Léo Ferré est un auteur, compositeur et interprète français né en 1916 et décédé en 1993.
Issu d'une famille de la petite bourgeoisie monégasque - son père est directeur du personnel au casino de Monaco -, Léo Ferret fait ses études en Italie, puis deux années de philosophie à Monte-Carlo, et, en 1935, il se rend à Paris pour y préparer l'Institut de sciences politiques et une licence de droit. De retour à Monaco en 1937, il exerce divers petits métiers en attendant d'être appelé sous les drapeaux. Durant les années de guerre, il travaille à Radio Monte-Carlo comme speaker, pianiste (il accompagne notamment Lys Gauty), régisseur et bruiteur.
L'époque « rive gauche » de Léo Ferré
À partir de 1943, il écrit ses premières chansons en compagnie de René Baër (« la Chanson du scaphandrier »), et, en 1945, il rencontre édith Piaf qui lui conseille de retourner à Paris. Aussi, en novembre 1946, débute-t-il au Boeuf sur le toit. Se produisant ensuite dans l'habituel circuit des cabarets (Le Quod Libet, L'écluse...), il fait la connaissance de Francis Claude, avec lequel il écrira plus tard « la Vie d'artiste », et de Jean-Roger Caussimon, dont il interprétera de nombreux textes (« Comme à Ostende », « Monsieur William », « Mon camarade », « le Temps du tango », « Nous deux », « Ne chantez pas la mort », etc.). Au hasard des rencontres, il se lie avec le milieu libertaire et donne ses premiers galas au profit de la Fédération anarchiste (1947) ; indéfectible, son soutien aux lieux d'expression anarchiste - Théâtre Libertaire de Paris, Radio Libertaire, maintes fois menacée d'interdiction, journal le Monde libertaire -, témoigne d'ailleurs d'un engagement sincère, quoique regardé parfois par certains comme esthétisant ou déclamatoire.
En 1950, il écrit un opéra, la Vie d'artiste, et enregistre ses premiers disques 78 tours ; mais le succès tarde à venir, malgré le Grand Prix du disque remporté en 1954 par Catherine Sauvage avec « Paris canaille » et « l'Homme » (son album éponyme, écrit par Ferré), ou encore le succès remporté par une chanson comme « Jolie Môme », interprétée par Juliette Gréco, qui a commencé à populariser son répertoire.

Léo Ferré
La consécration de Léo Ferré
La même année, Léo Ferré dirige l'orchestre de Monte-Carlo, pour son oratorio la Chanson du mal-aimé, d'après le poème d'Apollinaire. En 1955, il passe pour la première fois en vedette à l'Olympia, mais sera toujours plus à l'aise à Bobino, où il triomphe en 1958, face à un public tout acquis à sa cause de « Graine d'ananar ». Ce même public le plébiscite à nouveau lors de son passage à l'Alhambra en 1960.
Désormais, Ferré est reconnu par tous comme l'un des plus grands auteurs-compositeurs de son temps, et - consécration suprême - il est le premier chanteur à être accueilli dans la prestigieuse collection « Poètes d'aujourd'hui » des éditions Seghers (1962).
Le tournant de 1968 de Léo Ferré
En 1968, après avoir rompu avec sa seconde épouse, Madeleine, il part s'installer dans le Chianti en Toscane et ne prend guère part aux « événements » qui agitent le printemps, ce que d'aucuns lui reprocheront amèrement. Pourtant, après une crise d'inspiration certaine vers le milieu des années soixante, Léo Ferré retrouve après 1968 un second souffle qui ne le quittera plus et qui lui vaudra l'attachement indéfectible d'une nouvelle génération de fidèles, encline à faire de lui - à son corps défendant - le porte-parole de sa révolte. Le premier album sortant dans la foulée est assez symptomatique à cet égard, puisqu'à côté de chansons aussi fortes que « les Anarchistes » ou « Pépée » (1968), il contient ce qui va rester le plus grand succès public et radiophonique de toute son oeuvre, « C'est extra » (1969), dont le clin d'oeil aux Moody Blues annonce les expériences prochaines du chanteur avec le groupe pop Zoo et le formidable double album Amour-Anarchie.
Le chantre des poètes
Désormais retiré avec sa nouvelle famille sur ses terres de Toscane, Léo Ferré ne cesse plus de produire de nouveaux albums ; son écriture oscille régulièrement entre des chansons de facture classique (« Avec le temps », « Richard », « les Vieux Copains », « l'Oppression », « les Oiseaux du malheur »), parfois très noires (« la Mort », « Tu ne dis jamais rien », « la Folie ») et de longs récitatifs sur fond de musique symphonique (« Il n'y plus rien », « Et... basta ! », « la Solitude », « la Mémoire et la Mer », etc.).
Parallèlement à son oeuvre personnelle, considérable tant en volume qu'en importance, Léo Ferrer aura toujours eu à coeur de chanter les poètes classiques, comme Rutebeuf, Verlaine, Rimbaud, Apollinaire, Baudelaire, auxquels ils dédie des albums entiers, aussi bien que les poètes contemporains, comme Aragon (« Elsa »), Pierre Seghers (« Merde à Vauban ») ou encore Luc Bérimont.
Il s'éteint chez lui, à Castellina in Chianti, un 14 juillet, comme pour faire un ultime pied de nez aux conventions de cette société bourgeoise qu'il a toujours exécrées.
Quelques disques de Léo Ferré :
- 1988 - Léo Ferré au TLP Dejazet (2 CD EPM - FDC 21050)
- 1989 - Avec le temps... 1960-1974, 14 ans de chansons (11 CD Barclay - 841 260 2)
- 1993 - Intégrale 1953-1958 : les Années Odéon (7 CD Sony - 475 655 2)
- 1993 - Alors, Léo... (2 CD EPM - 982 822)
- 1998 - La Vie d'artiste (2 CD Harmonia Mundi - CML 574 1091 92)
C'EST EXTRA
Paroles et musique : Léo Ferré
Une robe de cuir comme un fuseau
Qui aurait du chien sans l'faire exprès
Et dedans comme un matelot
Une fille qui tangue un air anglais
C'est extra
Un Moody Blues qui chante la nuit
Comme un satin de blanc marié
Et dans le port de cette nuit
Une fille qui tangue et vient mouiller
C'est extra, c'est extra, c'est extra, c'est extra
Des cheveux qui tombent comme le soir
Et d'la musique en bas des reins
Ce jazz qui jazze dans le noir
Et ce mal qui nous fait du bien
C'est extra.
Des mains qui jouent de l'arc-en-ciel
Sur la guitare de la vie
Et puis ces cris qui montent au ciel
Comme une cigarette qui prie
C'est extra, c'est extra, c'est extra, c'est extra
Ces bas qui tiennent haut perchés
Comme les cordes d'un violon
Et cette chair que vient troubler
L'archet qui coule ma chanson
C'est extra.
Et sous le voile à peine clos
Cette touffe de noir Jésus
Qui ruisselle dans son berceau
Comme un nageur qu'on n'attend plus
C'est extra, c'est extra, c'est extra, c'est extra
Une robe de cuir comme un oubli
Qui aurait du chien sans l'faire exprès
Et dedans comme un matin gris
Une fille qui tangue et qui se tait
C'est extra
Les Moody Blues qui s'en balancent
Cet ampli qui n'veut plus rien dire
Et dans la musique du silence
Une fille qui tangue et vient mourir
C'est extra, c'est extra, c'est extra, c'est extra

Portrait de Léo Ferré sur scène,
au théâtre des Champs-Elysée en 1984
C'est extra de Léo Ferré
C'est extra de Léo Ferré est une chanson française écrite et mise en musique par Léo Ferré en 1969.
Au-delà de son énorme succès radiophonique et populaire, « C'est extra », qui s'impose comme le slow de l'été 1969, marque un virage capital dans la production de son auteur. Dans sa carrière, également, et dans ses rapports avec un public rajeuni : ces enfants de Mai 68, du rock and roll et de la pop music, qui redécouvrent soudain le vieil « anar », dont les anciennes chansons ne leur parlaient plus guère.
Car, en cette première partie des années soixante, les orchestrations des albums de Léo Ferré pèchent par leur banalité et par leur manque de personnalité, ce qui est un comble chez un chanteur qui n'était pas seulement poète, mais aussi musicien de grand talent. Confiés à d'habiles faiseurs tels que Jean-Michel Defaye ou Paul Mauriat, ces arrangements mêlent, souvent sans beaucoup de discernement, pupitres de cuivres, à la manière des big bands de jazz et grosses formations de cordes faussement classiques. Le tout donne un son sans doute fort prisé dans les variétés, mais tourne ostensiblement le dos aux courants musicaux de l'époque ; c'est-à-dire à ce rock and roll (d'essence américaine, par excellence), qui est en train de chercher (et de trouver) son second souffle, sous l'influence absolument déterminante des groupes anglais tels que les Beatles, les Rolling Stones, les Who, les Kinks, les Animals, les Moody Blues, etc.
Léo Ferré affirme avoir écrit « C'est extra » d'un seul jet et en très peu de temps, dans un moment de fort agacement, excédé d'entendre tout un chacun, autour de lui, utiliser l'expression à tout bout de champ. Mais, les références explicites aux Moody Blues et à leur tube « Night in White Satin » - qui est alors sur toutes les ondes - donnent à sa chanson un air d'actualité qui fera beaucoup pour son succès auprès des programmateurs de radio et d'un public jeune qui, sans le savoir, savoure les mêmes audaces érotiques que ses aînés de la génération précédente. La « Source au milieu / Qu'éclabousse du Bon Dieu... », de « Jolie Môme », devenant ici : « Cette touffe de noir Jésus / Qui ruisselle dans son berceau... »
Á la suite de cette première incursion dans l'univers de la pop music, Léo Ferré enregistre un album entier avec le groupe Zoo, brisant parfois la métrique régulière de ses chansons pour mieux coller aux improvisations des guitares électriques (« le Chien »). Dès lors, le pli est pris, et Ferré ne reviendra plus que de loin en loin à l'habituel schéma couplets-refrain, lui préférant ces longs monologues déstructurés sur lesquels il peut enfin donner libre cours à son intarissable verve poétique et à son goût pour la musique symphonique, qu'il finira par diriger lui-même.
Pour classique de forme qu'elle soit encore, « C'est extra » marque le point de départ de cette recherche, qui verra Léo Ferré rompre avec toutes les formes et toutes les règles en matière de chanson, et imposer ces récitatifs sur fond sonore, dont Serge Gainsbourg se fera, quelques années plus tard, une spécialité, et qu'il baptisera « talk over ».

Léo Ferré pour les 10ans de Radio Libertaire

Une acrylique de Léo Ferré par Gérard Germain

Des armes

Léo Ferré par Scl